Mais que vient donc faire l’huile dans cette histoire ? Lors de la reconquête par les Maccabées du Temple de Jérusalem souillé par les armées de l’envahisseur assyrien Antiochus Epiphane, on y aurait cherché de l’huile pour y rallumer la lampe sacrée. On y trouvera une fiole d’huile suffisante pour ne brûler qu’un seul jour, et elle brûlera durant 8 jours. C’est cela le miracle de Hanoucca. L’huile généreuse des latkes représenterait l’huile de la petite fiole.
La première crêpe à Hanoucca est apparue en Italie. Elle était composée de fromage ricotta. Dans la tradition juive du Nord de l’Italie, les mets doivent être non seulement huileux, mais lactés. En voici l’origine. Judith, une jolie veuve, s’était introduite dans le camp ennemi du général assyrien, Holopherne. Pour tromper sa vigilance, elle l’aurait séduit, lui aurait servi des mets salés, parmi lesquels du fromage et du vin qu’elle lui aurait fait boire jusqu’à enivrement. Ensuite, elle lui aurait coupé la tête. Le miracle de la fiole d’huile a longtemps occulté l’acte d’héroïsme de Judith dont est tiré Le livre de Judith dans le Tanakh. On préfère en effet raconter à nos chères têtes blondes l’histoire officielle de la fiole de Hanoucca/plutôt que cette histoire subversive, franchement scabreuse. Pourtant, c’est bien de Judith dont il s’agit lorsqu’on recommande la consommation de produits lactés à Hanoucca, essentiellement dans les communautés sépharades. Et tout fait sens.
Chez les Juifs ashkénazes, il faut attendre le 19e siècle pour découvrir, sur les tables, les latkes, un mot dérivé du russe qui signifie pièce. Ici, pas question d’y ajouter des produits lactés. Casherout oblige.
Les latkes sont composés principalement de pommes de terre importées par les Espagnols en Europe, après 1537. La pomme de terre était pour ces populations juives paupérisées d’Europe centrale et de l’Est un aliment de fortune, facile à cultiver et nutritif, présent à tous les repas de semaine comme de fête et de Shabbat. On la cuisait de mille façons possibles.
A Hanoucca, elle était reine, comme l’illustre ce chant populaire yiddish :
« – Bedeau, que désire le Rabbi ?
– Il aimerait qu’on lui serve…
– Quoi ?
– Des latkes dans de la graisse d’oie… Pour que le Rabbi et sa femme aient une gorge saine ».
En espérant que ces explications auront nourri grassement, mais sûrement votre culture générale sur Hanoucca, il ne reste plus maintenant qu’à éplucher les patates !
***
Ci-dessous la recette des latkes que nous délivre Nathalie Uffner, dans son délicieux livre La cuisine juive expliquée à mon ami goy (éd. Hugo Image), en précisant que sa mère était dans l’obligation d’en préparer un millier : salés pour le repas, saupoudrés de sucre pour le dessert !
Ingrédients
– 6 pommes de terre moyennes
– 1 oignon
– 2 œufs
– 60g de farine de matza (facultatif) ou de farine blanche
– 1 c.c. de sel
– Poivre
– Huile de friture
Eplucher et râper les pommes de terre dans un saladier. Presser pour en extraire le liquide.
Eplucher et râper l’oignon dans les pommes de terre.
Ajouter les œufs battus en omelette, la farine et le sel.
Mélanger jusqu’à l’obtention d’une pâte épaisse.
Faites chauffer l’huile et verser une grosse cuillérée de mélange par latke.
Faire frire des deux côtés jusqu’à ce que les galettes soient bien dorées.
Egoutter sur du papier absorbant.
Bon appétit !