Natan Ramet, rescapé de la Shoah. Homme, matricule, témoin (Éditions Racine) est à la fois un récit de vie émouvant et un véritable livre d’histoire qui contextualise fidèlement le parcours du survivant, grand militant pour la mémoire de la Shoah en Belgique. Né à Varsovie et arrivé à Anvers en 1930, Natan est confronté à l’antisémitisme de certains de ses professeurs durant ses études à l’Athénée de Berchem. Arrêtés le 21 août 1942 dans un train pour Bruxelles, Natan et son père, Judka, sont déportés de la Caserne Dossin dans le 6e convoi le 29 août 1942. Débarqués à Kosel, ils sont jugés « aptes au travail ». Victime des effroyables travaux forcés que doivent exécuter les déportés, Judka meurt à Trzebinia, fin 1942. De camp en camp, Natan, matricule 160242, survit à la tuberculose, au typhus, à Birkenau, au KZ de Varsovie, à Dachau, aux marches de la mort.
Libéré le 2 mai 1945, il retrouve sa mère et sa sœur, qui ont survécu dans la clandestinité à Anvers. Forcé de travailler, Natan devient cliveur, puis crée sa propre entreprise diamantaire. Engagé dans la vie communautaire, il se mobilise contre l’implantation du Carmel d’Auschwitz, témoigne dans les écoles, préside le comité organisateur du Musée Juif de la déportation et de la résistance à Malines, « l’œuvre de sa vie », puis représente la communauté juive au sein de la Commission Buysse sur les biens juifs spoliés. Président d’honneur de Kazerne Dossin, Mémorial, musée et centre de documentation de l’Holocauste et des Droits de l’homme, Natan Ramet décède en 2012 avant l’inauguration du nouveau musée.
Un homme d’exception
L’auteur, Ronny Vandecandelaere, retrace la genèse de la remarquable biographie de cet homme d’exception. « Né à Roeselare, j’avais neuf ans lorsque j’ai visité le Mémorial de Breendonk avec mes grands-parents. Très impressionné, j’ai alors commencé à lire sur la Seconde Guerre mondiale, les camps de concentration et la déportation des Juifs. J’ai rencontré Natan Ramet pour la première fois lorsque j’étais directeur du centre pénitentiaire agricole de Ruiselede, un centre fermé proche de Bruges », se souvient Ronny Vandecandelaere. « Je l’avais invité à témoigner devant la cinquantaine de jeunes détenus. Nous avons tous été fort émus par son récit et, à ma demande, il est revenu plusieurs fois témoigner à Ruiselede. Nous sommes devenus amis et nous nous voyions régulièrement pour manger ensemble, parler de son expérience de survivant et de ses camarades aux camps. Il m’a présenté sa femme, Liliane, ses enfants José et Patsi. En 1995, j’ai écrit Häfling 160275, monologue théâtral sur l’histoire de Tobias Schiff, un ami de Natan. Je suis devenu guide au Musée Juif de Malines et j’ai continué à guider pour Kazerne Dossin. Natan était un homme extraordinaire ! Aujourd’hui, plus que jamais, alors que disparaissent les derniers survivants, il faut transmettre sa mémoire. La couverture du livre reproduit un dessin de Natan que Patsi a trouvé parmi les documents d’archives de son père. »
Patsi Ramet précise que ce livre est basé sur les entretiens de Ronny avec Natan et les nombreux témoignages écrits et filmés de son père. Peu après son décès, alors que qu’elle travaillait encore au Musée de Malines et qu’elle déjeunait avec Rony Vandecandelaere, elle lui a confié qu’elle aimerait qu’un livre soit consacré à son père et elle lui a proposé d’en être l’auteur. Il lui a alors rétorqué qu’il avait depuis longtemps l’idée d’écrire ce livre et se préparait à en lui en faire la proposition ! « Il m’a tout à fait associée au projet, m’envoyant les chapitres de son livre au fur et à mesure de leur rédaction pour que nous en discutions ensemble », se souvient Patsi. « Publié en néerlandais en 2015 chez EPO, l’ouvrage s’est très bien vendu. Nous souhaitions qu’il paraisse aussi en traduction française et Laurence Schram du musée Kazerne Dossin nous a mis en contact avec les Éditions Racine. Retardé par la pandémie, ce projet s’est enfin réalisé et le livre a été présenté au public à Kazerne Dossin, en septembre 2023. »