La narratrice revoit un cousin qu’elle n’a pas vu depuis des décennies. Avec d’autres enfants de la famille, ils avaient passé des vacances ensemble dans une grande propriété à la campagne, au bord de la Loire. C’est le début d’une vaste évocation familiale, sur trois générations. L’auteur est une conteuse née. On ne la quitte plus. Une écriture alerte, parfois familière, en tout cas généreuse et délicate. Lili, la grand-mère, est issue de la bourgeoisie catholique. Nonobstant, elle épouse un Juif russe, Ruben. Une famille (presque) comme une autre. On se dit même par moments qu’on eût aimé en être, prendre part à ces grandes tablées des cousins-cousines et des frères et sœurs, où l’on parle tous en même temps, mais où les enfants disent s’il te plaît. France profonde, provinciale, qui n’existe plus, n’existera plus jamais. Sonia David évoque surtout ses grands-parents. Lili, éducatrice dans l’âme, un rien rigide, très peu yiddishé mamè mais aimante. Ruben, survivant du camp de Dachau, a un destin plus singulier, et secret. Passionné de technique cinématographique, il collabora à la réalisation du film d’André Malraux, Espoir, sierra de Teruel en 1938. Mais il reste obstinément muet sur son passé au camp et sur les tortures dont il fut l’objet. Il y a à cela une raison (tragique) que le livre dévoile.
Cette famille d’apparence si unie, si idyllique, comporte des failles. C’est ainsi que les marques d’affection y sont proscrites. Un rapport peu clair à la vérité. Nul ne s’aviserait d’y déclarer : le roi est nu. Jusqu’à ce que quelques signes – quelques symptômes – surgissent, qui nous disent que nous ne sommes pas tout à fait dans le meilleur des mondes possibles. Cette photo sépia d’une famille nombreuse à l’ancienne, seul ce livre, désormais, la réunit.
Merci pour ce conseil de lecture qui donne très envie de découvrir ce roman sans attendre !