La LICRA revoit le jour en Belgique

Véronique Lemberg
Face à la montée des discours de haine, des actes de racisme et d’antisémitisme, une section belge de la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra) vient d’être recréée. La Licra Belgique s’inscrit dans la continuité de la mission internationale de la Licra française qui, depuis près d’un siècle, œuvre pour la défense des droits humains et la promotion des valeurs de tolérance et d’égalité.
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Organisation universaliste, laïque et non partisane, la Licra Belgique se fixe pour objectifs d’assurer une mission de plaidoyer, auprès des autorités politiques et des assemblées parlementaires, afin de faire évoluer la législation en matière de lutte contre le racisme, l’antisémitisme et les discriminations. Elle veillera à accueillir et accompagner juridiquement et judiciairement des victimes de racisme, d’antisémitisme et de discrimination.

La Licra s’assurera que le Règlement sur les services numériques soit réellement appliqué pour pouvoir assurer une meilleure surveillance des réseaux sociaux et obtenir que les contenus racistes et antisémites soient le plus rapidement retirés et, le cas échéant, engager la responsabilité des plateformes qui ne respecteraient pas leurs obligations.

En ce qui concerne la prévention, la Licra mènera une action de formation dans les écoles et dans les universités, et dans la formation initiale et continue des enseignants. Elle interviendra également dans les écoles de police et auprès des magistrats pour leur faire prendre conscience des enjeux sociaux liés à la lutte contre le racisme et l’antisémitisme et faire évoluer leur pratique.

Pourquoi relancer la Licra en Belgique alors qu’il existe un organisme public de lutte contre le racisme et l’antisémitisme (Unia), et que des associations antiracistes ont été créées pour mener ces combats ? La réponse réside évidemment dans leurs failles et leurs carences en matière de lutte contre l’antisémitisme.

« Depuis des années, Unia travaille sur les discriminations, mais remplit mal ses missions au regard de la lutte contre l’antisémitisme », déplore Viviane Teitelbaum, administratrice de la Licra Belgique. « Unia ne prend que très rarement l’initiative d’agir en justice lorsque des incidents antisémites lui ont été signalés. Bien souvent, ce n’est qu’une fois que les victimes juives ont intenté une action en justice et se constituent partie civile qu’Unia se manifeste pour se joindre à la plainte. C’est ce qui m’est arrivé personnellement. C’est bien gentil mais à ce stade, je n’avais plus besoin d’Unia à mes côtés. Lorsqu’on est victime d’un acte antisémite, on n’a ni la force ni nécessairement les moyens financiers pour entamer une lourde procédure judiciaire. Il est donc important que la Licra prenne en charge ce qu’Unia ne fait pas en matière d’assistance aux victimes d’antisémitisme. » Par ailleurs, Unia se cantonne bien souvent à une interprétation trop stricte de la loi : il faut qu’il y ait incitation à la haine et que l’on puisse prouver cette intention. Malheureusement, la plupart des incidents antisémites actuels ne répondent pas à ces critères légaux. Ce n’est pas une raison pour ne pas condamner, moralement et médiatiquement, ces actes antisémites. D’autant plus que dans de nombreux autres dossiers, Unia ne se prive pas de porter cette condamnation.

Se préoccuper des Juifs vivants

Quant au monde associatif, il a souvent tendance à noyer l’antisémitisme dans la lutte contre le racisme. Dans certains cas, la lutte contre l’antisémitisme ne semble même plus faire partie de ses préoccupations alors que certaines associations ont été créées par des personnalités juives. C’est le cas du MRAX. Il suffit de consulter son site Internet pour s’en rendre compte. « Quand vous cliquez sur l’onglet ‘‘antisémitisme’’, les deux seules occurrences qui apparaissent sont consacrées aux pavés de mémoire ! », pointe Viviane Teitelbaum. « La mémoire de la Shoah est importante, mais une organisation antiraciste digne de ce nom ne peut faire l’impasse sur la lutte contre l’antisémitisme à mener aujourd’hui, d’autant plus que nous assistons à la vague la plus importante depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Depuis le 7 octobre, les Juifs vivent dans la peur et l’angoisse. Certains passent leur temps à dissimuler leur judéité et le MRAX ne trouve rien de mieux qu’à documenter cette question préoccupante à travers les pavés de mémoire pour des Juifs morts. Et tout cela sans dire un mot sur la défense des Juifs vivants confrontés à l’antisémitisme qui les menace aujourd’hui. » C’est incontestablement une lacune criante que la Licra devra combler.

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