Expert audiovisuel européen de renom, ancien journaliste-producteur à la RTBF, critique de cinéma et réalisateur, Henri Roanne-Rosenblatt revient, à l’heure de la retraite, sur ses premières années de vie. Et voilà que naît sous sa plume l’histoire d’un petit garçon juif détourné de ses tourments grâce au cinéma. Son roman, édité en 2013, est devenu un film dont voici le pitch : « Enfant, Saül échappe à la Shoah grâce au kindertransport qui lui permet de passer de Vienne à Bruxelles. Quarante ans plus tard, il est propriétaire d’un restaurant delicatessen dédié au 7ème art où se croisent des personnages aux histoires aussi singulières que joyeuses. Saül fait la rencontre d’Hannah et s’implique dans le projet cinématographique de l’un de ses jeunes amis, étudiant à l’INSAS. Alors qu’il pense avoir surmonté ses traumatismes, ces deux événements le replongent dans son passé d’enfant caché et le confrontent à des souvenirs profondément enfouis ».
Touché par le récit sensible et intime de son ami de longue date, le réalisateur luxembourgeois, Nicolas Steil réunit Henri Roanne et Michel Fessler, talentueux scénariste trois fois nominé aux Oscars, afin de travailler sur le scénario du film. Plusieurs versions verront le jour jusqu’à peaufiner l’ultime mouture.
Belle présence de Simon Abkarian
Pressenti de longue date sur ce projet, Simon Abkarian se réjouit d’incarner Saül : « J’aimais énormément le scénario. D’abord parce que le cœur de son action se situe dans les années 80 qui furent celles, très intenses pour moi, où je suis passé de l’adolescence à l’âge adulte. Ensuite parce qu’il reparlait de l’horreur de la Shoah et qu’il me paraissait essentiel qu’on « remette sur l’établi » cette « catastrophe qui, malgré ses six millions de morts, est aujourd’hui, à mon avis, inexplicablement, « dé-historisée ». J’aimais l’angle qui avait été pris pour y revenir, celui d’une sorte de conte, sous la forme des souvenirs qu’un adulte a gardé du petit garçon juif blessé qu’il avait été, pour avoir cru être abandonné par sa mère… alors qu’en réalité, elle lui sauvait la vie ».
Si les dialogues sont en français, qu’on y entend de l’allemand et que le yiddish se faufile dans quelques bouches, il semble que le langage principal soit celui du cinéma, célébré sous toutes ses formes : des titres de films aux anciennes affiches explicites, des musiques de films emblématiques aux répliques mythiques. Tous les protagonistes semblent nourris des mêmes références classiques, une culture commune joyeusement partagée : « Le personnage de Saül m’a immédiatement « parlé » parce qu’il avait été élevé et éduqué par le cinéma, exactement comme moi. Quand j’étais enfant, au Liban, j’étais tout le temps fourré dans les salles de ciné (…). Je me suis construit un peu au hasard des films que je voyais, essentiellement ceux des années 40-50, les films américains de série B, voire de série Z. Quand j’ai lu le scénario du film (…), j’ai été troublé d’y trouver la plupart des films que j’avais vus et entre autres Gilda, avec Rita Hayworth et Glenn Ford, que je ne me lasse pas de revoir. Etant un inconditionnel des cinéastes des années 40-50, les Capra, Lubitsch, Ford, Huston et autres, étant aussi fan de comédies musicales, je connaissais tous les films évoqués par Saül dans le film » complète Simon Abkarian avec enthousiasme.
On trouve sur Le Chemin du bonheur, diverses époques, des flashbacks qui renvoient Saül à Vienne en 1938, des mises en abîmes, du cinéma dans le cinéma ainsi que tous les métiers et toutes facettes du cinéma, des gouttes suées sur le scénario aux larmes de rires du spectateur. Le Déli, et son ambiance américano-yiddisho-bruxelloise, ressemble à un décor en carton-pâte des années 50. Bruxelles et ces lieux emblématiques, du cinéma Galeries au centre-ville, sont aussi mis à l’honneur. Contrastant avec l’inhumanité des nazis et le passé traumatique qui vient hanter l’esprit de Saül, tous les personnages du film apparaissent, tel un conte, bienveillants, aidants, compréhensifs, un peu comme sur un plateau de cinéma, où chacun met le meilleur de lui-même pour servir le projet collectif qui, à son tour, apporte des satisfactions personnelles. Cette douce comédie romantique sur fond de drame balaie néanmoins assez vite les obstacles comme s’il suffisait de vouloir pour pouvoir. Le cinéma lui, le peut.
Le Chemin du bonheur
D’après le roman Le Cinéma De Saül Birnbaum de Henri Roanne-Rosenblatt
Réalisation : Nicolas Steil
Avec Simon Abkarian, Pascale Arbillot, Michel Vuillermoz, Eric Caravaca, Helena Noguerra, etc. Avec la participation de Mathilda May et Brigitte Fossey
Avant-première le 22 juin à 19h au cinéma des Galeries en présence d’Henri Roanne-Rosenblatt et de Nicolas Steil. La projection sera suivie d’un échange. Sortie en salles : le 22 juin 2022