Ce qui séduit dans le livre de la jeune Liza Hazan (22 ans), c’est la vivacité de son écriture, une fraîcheur qui traduit sa sincérité, sans pour autant verser dans la candeur ou la naïveté. Est-ce sa jeunesse ou son talent ? La narratrice est étudiante en lettres à Paris. Ses grands-parents ont quitté le Maroc pour la France, ses parents la France pour la très francophone Netanya en Israël. Et c’est à Paris qu’elle apprend, effondrée, les massacres du 7 octobre 2023 dans le Sud d’Israël, près de Gaza. C’est en écrivant qu’elle va surmonter son effroi, tenter d’y voir clair, en elle, autour d’elle, à Paris et en Israël où sont les siens, ce pays qu’elle aime (surtout Tel-Aviv et Yafo, et leurs fêtes techno). Du jour au lendemain, ses camarades étudiants deviennent hostiles. Antisionistes/antisémites. Elle interroge sa propre judéité ainsi que son positionnement politique, à gauche ou à droite. Elle n’y voit plus très clair, mais conserve deux ou trois certitudes malgré tout : elle est indéfectiblement juive – Israël est son pays, et elle rêve de devenir écrivaine. Et même une écrivaine du VIe arrondissement de Paris, de celles qui fréquentent Le Flore ou Les Deux Magots. Stefan Zweig avait écrit Le Monde d’hier, elle écrirait le monde de demain…
En attendant ce jour, elle dansera comme une folle, sans avoir peur. Ce qui séduit aussi dans le récit de Lisa Hazan, c’est son esprit de révolte. Déjà, lors de son service militaire, elle se montrait si insupportable envers ses supérieurs qu’ils ont fini par la renvoyer. Aujourd’hui, à Paris, après le 7 octobre, elle se sent seule. On lui dit que les horreurs perpétrées par le Hamas ne sont que justice : les Juifs l’ont mérité. Telle est la doxa de la plupart des étudiants qu’elle côtoie. Et le moindre soupir juif n’apporte que la réponse : « À Gaza, c’est pire. »