Qui se souvient, qui se souviendra d’eux ? Oui, ils sont bien oubliés tous ces Juifs immigrés d’Europe orientale qui crurent que le communisme sauverait l’humanité de tous les maux, la misère, la guerre, le racisme et l’antisémitisme. L’historienne Zoé Grumberg leur rend hommage et décrit minutieusement leurs parcours, génération après génération. Elle le fait sous la forme d’une thèse, un exemplaire travail de recherches devenu aujourd’hui un livre. Dépouillement de fonds d’archives, notamment des organisations juives communistes d’après-guerre, rencontres avec d’anciens militants et de leurs enfants. Il y est beaucoup question des FTP-MOI, ceux par exemple de la célèbre Affiche rouge auxquels rendit hommage le poème d’Aragon que chanta Léo Ferré. Si l’accent est mis sur l’après-guerre, il fallait bien que l’auteur remonte aux années 1920-1930, avec la création par le Parti de la MOE (Main d’œuvre étrangère) devenue MOI (main d’œuvre immigrée), formée par « groupes de langues » dont un groupe de langue yiddish dirigé par Louis Gronowski, essentiellement des Juifs polonais, un des plus importants. Ils lisaient Di Naye Presse (la Presse Nouvelle). Ils se définissaient tous comme communistes, mais dans une distance plus ou moins importante avec le Parti, très intégrateur.

Se sont-ils assimilés ? Justement non. Ils sont restés juifs, au grand dam, parfois, des dirigeants du Parti qui voulaient en faire autant de « prolétaires », surtout s’ils vivaient dans un quartier populaire et encore très juif de Paris, comme Belleville et Ménilmontant. Être juif et communiste ne leur semblait pas incompatibleIls étaient des Juifs sans judaïsme, mais ne reniant pas leur judéité, leur culture. Ces hommes et ces femmes, dont l’idéal était grand, ne méritent pas qu’on les oublie, même s’ils furent souvent et délibérément aveugles devant les mensonges et les crimes d’un certain Joseph Staline.






