Pour l’observateur distant, ces assises quinquennales peuvent sembler relever d’une bureaucratie lointaine. Pourtant, cette année, ce qui s’est joué dans les couloirs du Centre de Convention international n’avait rien d’anecdotique. Ce 39e Congrès sioniste mondial fut un moment de clarification concernant l’Israël d’aujourd’hui et sa relation avec la diaspora.
La grande victoire de ce 39e Congrès sioniste réside dans le fait que les composantes centristes du monde juif, ces fameux swing votes souvent hésitants, ont choisi de s’aligner sur les positions progressistes sur la quasi-totalité des enjeux cruciaux débattus en plénière. Sur le refus de financer la recolonisation de Gaza, sur la préservation de la solution à deux États via le dossier E1 (projet d’extension de colonies à l’Ouest de Ma’ale Adoumim), sur la réouverture de la partie mixte du Mur des Lamentations, ou sur la défense des ONG israéliennes, une majorité cohérente s’est formée pour s’opposer aux mesures incendiaires avancées par les soutiens du gouvernement actuel au sein du Congrès. C’est la preuve que lorsque la voix progressiste est structurée et force de proposition, elle devient le point de ralliement de tous ceux qui refusent de voir le sionisme dévoyé.
Ce succès ne doit rien au hasard. Tout d’abord, notre famille politique arrivait avec une présence solide au Congrès. L’Union des Sionistes Progressistes (UPZ-Meretz) sort renforcée du scrutin mondial avec 28 mandats, dont le siège en Belgique remporté par la liste conjointe CCLJ-Hashomer Hatzair-JJL-Meretz (sur les cinq alloués à l’Organisation Sioniste de Belgique). Ce succès est aussi le fruit d’un travail entamé bien en amont. À travers le monde, les délégations de l’UPZ avaient préparé le terrain plusieurs mois à l’avance, rédigeant des projets de résolution pour ancrer nos valeurs dans les règlements de l’institution. Sur place, à Jérusalem, cette préparation s’est transformée en une campagne d’influence active. Dans les commissions et les couloirs, nous sommes allés chercher les indécis, argumentant patiemment pour démontrer que nos lignes rouges n’étaient pas des postures partisanes, mais des garde-fous nécessaires pour la sécurité et l’avenir démocratique d’Israël.
Ainsi, depuis la Belgique, nous avions initié et soumis une résolution sur la transparence budgétaire et la redevabilité, partant du principe simple mais essentiel que l’argent du Congrès sioniste mondial ne peut servir des agendas opaques. Après d’intenses tractations, ce texte a été fusionné avec une proposition de nos alliés pour aboutir à un mécanisme robuste, désormais adopté, qui impose une traçabilité accrue des flux financiers. Il s’agit certes d’une victoire technique, mais dont les conséquences politiques sont importantes pour la bonne gouvernance. On a pu récemment constater cette importance avec la tentative du Likoud d’imposer des nominations empreintes de népotisme, en désignant Yaïr Netanyahou et Yanki Deri comme candidats à des postes clés de l’Organisation sioniste mondiale.
Le travail ne fait que commencer
Le Congrès est certes terminé, mais le travail ne fait que commencer. La structure de l’Organisation Sioniste Mondiale est ainsi faite que les grandes orientations se décident en plénière, mais que le contrôle politique se joue année après année au sein du Vaad Hapoel (le Conseil Général Sioniste). C’est ici que notre poids sera démultiplié. Contrairement au Congrès qui réunit des centaines de personnes, le Vaad Hapoel est une instance resserrée de 150 délégués. Ayant obtenu que notre liste soit représentée dans cette arène plus restreinte, où chaque voix compte davantage, nous y veillerons à l’application stricte des résolutions adoptées et pourrons être une force de proposition pour des nouvelles mesures – afin de continuer à faire vivre ce camp de la raison.
Enfin, notre liste a une vocation locale. Trop souvent, les activités de l’Organisation sioniste mondiale restent abstraites pour la communauté juive de Belgique. Dans les années à venir, nous travaillerons étroitement avec l’UPZ pour rendre tangibles les retombées de ce Congrès dans notre pays. Que ce soit par le soutien à nos mouvements de jeunesse sionistes, la promotion d’un judaïsme humaniste et laïc, ou le renforcement des liens culturels, l’apport du Congrès doit être visible.
Nous avons prouvé à Jérusalem que la diaspora n’est pas condamnée à être une chambre d’enregistrement. Elle peut être une boussole morale. En ces temps troublés, savoir que la raison a repris ses droits au cœur des institutions nationales est une nouvelle qui, je l’espère, vous donnera autant de force qu’à moi.






