Le samedi 15 avril j’ai participé à la dernière en date des grandes manifestations contre le coup d’Etat judiciaire du gouvernement Netanyahou. On pouvait imaginer qu’elle serait plus modeste que celles qui l’avaient précédée. Après tout, le premier ministre avait annoncé une « pause » dans la course folle à la « réforme ». Des négociations entre ses représentants et ceux de l’opposition avaient démarré sous la houlette du président de l’Etat avec l’intention affichée de trouver quelque « compromis » acceptable pour les deux camps. L’heure était à un certain apaisement. Alors, pourquoi la mobilisation ne faiblit-elle pas ?
La raison est aussi simple que brutale : personne ne fait confiance à Netanyahou. Le menteur invétéré, le personnage retors et sans scrupule qu’il a toujours été, a atteint à la faveur de cette crise des abîmes d’indignité inédits même pour lui. On se dit que sa pause n’est qu’une ruse qui lui permet de reculer pour mieux sauter ; que son plan de destruction du système judiciaire destiné à lui assurer l’annulation de son procès, ou du moins la haute main sur la nomination de juges malléables qui, en cas de condamnation probable, le relâcheront en appel, est toujours sur la table et n’attend que le moment propice pour passer à la Knesset ; que le seul moyen de le faire plier pour de bon est de maintenir la pression.
Une conclusion – provisoire – s’impose : la pression paie. Si le Premier ministre a lâché du lest, c’est parce qu’il n’a pas eu le choix. La mobilisation des forces vives de la nation ; la mutinerie de l’élite militaire de réserve ; l’abaissement le 14 avril par l’agence de notation Moody’s de la perspective des notes de crédit de l’économie israélienne ; sa plongée spectaculaire dans les sondages – tout cela a fini par le persuader de calmer le jeu. Au mépris des éructations des fous de Dieu de son cabinet, il a interdit aux Juifs de monter sur l’esplanade du Temple/Haram el-Sharif lors des derniers jours du Ramadan. Face à la fronde du pays, mais aussi d’une partie de ses propres troupes, Netanyahou a été forcé de réintégrer sans autre forme de procès son ministre de la Défense, Yoav Gallant, démis pour avoir osé demander la suspension du processus législatif au vu de la détérioration de la situation sécuritaire. Le Premier ministre refuse désormais de promettre publiquement que ledit processus législatif ira à son terme et ne cesse de proclamer le besoin d’unité et d’un large accord pour y parvenir. Surtout, il s’est débarrassé, et nous a débarrassés, de la présence empoisonnée de son fils Yaïr, apparemment exilé aux Etats-Unis.
Il est difficile de faire comprendre à qui ne vit pas au pays la signification de ce dernier développement. Tellement disproportionnée était l’influence de ce petit Trump qu’on a pu dire du cinquième gouvernement Netanyahou qu’il était en fait « le premier gouvernement Yaïr Netanyahou ». Régnant en maître sur les réseaux sociaux, il était à lui seul. Une machine de haine, d’appels au meurtre d’opposants et de théories conspirationnistes. Dans le triangle dément formé par le Premier ministre, sa femme Sarah et leur fils aîné, c’est ce dernier, allié à sa mère, qui était le plus puissant. Or, il semble bien que le rapport de force au sein de la famille régnante se soit brusquement inversé. Dans un renversement d’alliances plus digne d’une tragédie shakespearienne que du quotidien d’une résidence de premier ministre d’un pays moderne, l’épouse a abandonné le fils pour se ranger aux côtés du père. Et Netanyahou a regagné un peu d’autonomie. Est-il en train d’abandonner en douce la « réforme » judiciaire qui décidément ne tourne pas à son avantage ? C’est possible. A condition, précisément, que ses adversaires ne lâchent pas la pression.
Mais déjà, une autre pomme de discorde menace la cohésion de sa coalition et excite les passions de l’opposition libérale : le projet de loi censé pérenniser l’exemption de fait des ultra-orthodoxes du service militaire. Cela fait des années que la Haute Cour de Justice accorde aux gouvernements successifs délai sur délai pour légiférer enfin sur une question qui divise gravement l’opinion. C’est fini désormais, il faut trancher avant la fin mai. Plus facile à dire qu’à faire. Pour les Israéliens qui portent le fardeau de la défense du pays, l’exemption des haredim est une injustice dont ils se sont accommodés tant qu’elle était « provisoire » ; la graver dans la loi leur serait proprement insupportable. Pour les partis ultra-orthodoxes, c’est une condition sine qua non de leur participation à la coalition. D’où leur insistance, non seulement à faire une loi qui les préserve à jamais de l’obligation de servir sous les drapeaux, mais à la mettre à l’abri de la censure probable de la Haute Cour de Justice. Un beau sac à nœuds, dont on voit mal comment le gouvernement pourra se sortir. Une manière élégante de le dénouer serait d’imposer à tout le monde, haredim et Arabes compris, un service national, militaire ou civil selon les préférences de chaque communauté. Hélas, le fait même qu’on en parle depuis les années montre qu’il ne faut pas trop en attendre.
Sur une telle toile de fond, on comprend que les Israéliens préparent sans enthousiasme excessif les festivités du 75e anniversaire de l’Etat juif. La veille, 24 avril, lors de la Journée du souvenir des soldats tombés au champ d’honneur et des victimes du terrorisme (Yom Hazikaron), les familles iront se recueillir sur la tombe de leurs proches disparus. Leurs organisations ont fait savoir que les ministres et membres de la Knesset de la coalition ne seront pas les biens venus dans les cimetières militaires, surtout ceux qui se sont soustraits au service (voir plus haut). On peut s’attendre à des scènes déplaisantes, peu conformes à l’atmosphère de recueillement et à la solennité du moment. Ce gouvernement salit tout ce qu’il touche.
Tous les ans, une organisation israélo-palestinienne réunit ce jour-là des familles endeuillées des deux bords pour une commémoration partagée de leur tragédie. Un peu de fraternité et d’espoir dans un monde de violence et de haine. Yoav Gallant, ce même ministre de la Défense qui a fait preuve, on l’a vu, d’une once de courage qui lui a valu l’ostracisme de son patron et les foudres de sa « base », cherche à regagner un peu de son lustre droitier en interdisant aux familles palestiniennes de quitter la Cisjordanie. Le prétexte invoqué est la situation sécuritaire. Il est probable que la Haute Cour de Justice y mettra bon ordre. Raison de plus pour la droite de chercher à la tuer.
Mais parlons d’autre chose, comme dit la chanson. A la manifestation par laquelle j’ouvrais cette chronique, j’ai convié un ami de passage : l’historien, ancien ministre et homme des médias Jean-Noël Jeanneney. En passant soit dit, il en fut fort impressionné, lui qui pourtant, en sa qualité de Français, en est plutôt blasé. Jeanneney, dramaturge d’occasion mais de grand talent, était venu assister à la version hébraïque de sa pièce Un de nous deux, donnée au théâtre national Habima dans le cadre des commémorations de la Shoah. La pièce, tirée d’un événement historique, met en scène deux éminents personnages qui se trouvent enfermés dans une petite maison à proximité du camp de concentration de Buchenwald : Léon Blum et Georges Mandel. En attendant qu’ils sachent qui des deux paiera de sa vie l’exécution de Philippe Henriot, l’ignoble et talentueux propagandiste de Vichy (ce sera Mandel, livré par les Allemands et assassiné en juillet 1944 par la Milice), ils conversent dans ce huis clos. Ils parlent de la politique, des relations difficiles entre morale et politique, des limites du volontarisme politique, de la place du hasard en politique, des mérites respectifs du réalisme et de l’idéalisme. De leur judaïsme aussi. Derrière eux se profilent leurs maîtres à penser, Jean Jaurès pour le premier, Georges Clemenceau pour le second. C’est vif, enlevé, d’une haute tenue intellectuelle et humaine, et, comme l’on dit, d’une vraie actualité. Avis aux programmateurs du CCLJ.
Une fois de plus Barnavi tombe dans ses travers : Sa haine viscérale de Netanyahou. Cette fois il se laisse aller plus loin qu’il n’a jamais été. Jugez-en :
« Le menteur invétéré, le personnage retors et sans scrupule qu’il a toujours été, a atteint à la faveur de cette crise des abîmes d’indignité inédits même pour lui.
Dans le triangle dément formé par le Premier ministre, sa femme Sarah et leur fils aîné, c’est ce dernier, allié à sa mère, qui était le plus puissant.
Ce gouvernement salit tout ce qu’il touche »
Barnavi s’acharne sur un homme qu’il pense être à terre ! Il croit ce qu’il lit dans HAARETZ et autre journal gauchiste. Il fait partie de cette élite gauchiste qui ayant perdu le pouvoir politique dans les années 90 a repris le pouvoir à travers le judiciaire.
Savez-vous qu’en Israël, chaque Ministre est flanqué d’un ‘’conseiller juridique’’ doté des pleins pouvoirs pour INTERDIRE à ce Ministre toute décision qu’il n’approuverait pas ? Que n’en change-t-il pas me direz-vous ? Il n’en a pas le pouvoir car ce n’est pas lui qui choisi son ‘’conseiller’’. C’est une nébuleuse judiciaire, un Comité de nomination qui lui assigne ce conseiller. Ce Comité de nomination n’est pas élu : il s’auto-nomme et grâce à l’exercice d’un certain népotisme, il accapare le pouvoir en Israël.
Dans quel pays au monde démocratique une telle tutelle est-elle exercée par le judiciaire sur le politique ?
C’est pour cette raison que la réforme en cours est nécessaire et qu’elle se fera !
Monsieur Douenias
Le bashing du premier ministre israélien est la seule chose dont est capable l ancien ambassadeur d Israël en France désigné non pas pour ses compétences mais uniquement en raison de son amitié avec le ministre des affaires étrangères de l époque raison pour laquelle il a été relevé de ses fonctions une fois le nouveau ministre en fonction.
Sa prose en devient non crédible tant elle est excessive.
Je le regrette parce qu il m avait fait très bonne impression lorsqu il était directeur du musée de l Europe en Belgique il y a quelques années.