Littéralement le mot « Pourim » en hébreu signifie « Les sorts ». Mot d’origine akkadienne (la langue parlée en Mésopotamie à l’époque du récit), il fait ainsi référence à la date tirée au sort par les perses pour l’anéantissement des juifs. A Pourim nous commémorons les évènements contés dans la « Meguilat Esther », le livre d’Esther. Cette reine de l’empire achéménide, où se trouve la quasi-totalité de la population juive mondiale de l’époque, a sauvé son peuple de la campagne d’extermination planifiée contre lui.
La date a lieu le 14e jour du mois d’Adar, qui tombe cette année du lundi 6 mars au soir jusqu’au lendemain soir du mardi 7 mars.
La fête est traditionnellement marquée par quatre obligations religieuses (« mitzvot ») :
Pourim est également connu pour être la fête du déguisement. Enfants et adultes se griment pour se rendre à la synagogue. Les enfants sont également souvent munis de crécelles, qui sont utilisées avec beaucoup d’enthousiasme lors de la lecture de la meguilat, afin de couvrir la lecture du nom d’Haman, l’ennemi juré des Juifs dans le récit.
Dans les communautés ashkénazes se tenait également ce qu’on appelle un « pourimshpiel », sorte de théâtre populaire et folklorique dans lequel l’histoire d’Esther est contée, par des comédiens grimés et déguisés de manières extravagantes. Cette forme de théâtre perdure depuis près de mille ans. Au cours du 18e siècle elle prend la forme d’une satire profonde de la société et des inégalités dans celle-ci. Pour ces raisons les pièces ont lieu souvent à l’extérieur des synagogues, celles-ci ne pouvant tolérer de satires en leurs murs.
La tradition de se costumer, se masquer et se grimer lors de Pourim est mal identifiée mais deux hypothèses sont retenues :
Le récit nous raconte que le grand roi perse Assuérus donna un immense banquet en sa capitale, Suse. Au terme de sept jours de festivités il fait chercher son épouse, la reine Vashti afin d’exposer sa beauté au peuple et à l’armée.
Cette dernière qui n’accepte pas de paraître comme un objet devant la foule refuse la convocation et s’attire les foudres de son époux qui va alors la répudier.
A la suite de cette répudiation, une nouvelle épouse doit être trouvée pour le roi et c’est alors que l’attention des eunuques royaux se porta sur Esther (de son vrai nom Hadassa), orpheline adoptée par un cousin, un fonctionnaire royal juif du nom de Mordekhaï. Celui-ci conseille à sa cousine de ne pas révéler au roi qu’elle est juive.
Grâce aux eunuques royaux qui l’entourent, Hadassa qui se fait nommer alors Esther (qui signifie « cachée ») devient alors la favorite du roi. Celui-ci finit par la choisir comme épouse, et Mordekhaï qui est témoin d’une tentative de complot mené par deux eunuques contre le roi averti Esther qui va alors sauver ce dernier.
Après plusieurs années, un nouveau haut fonctionnaire du palais est nommé par le roi. Celui-ci est le personnage d’Haman, descendant d’Agag un roi Amalécite vaincu par Saül, le premier roi d’Israël et de Juda. Ce dernier décide alors de demander à tous les fonctionnaires de s’agenouiller devant lui pour lui prêter allégeance. Mordekhaï refuse de s’exécuter, justifiant ce refus par sa foi qui lui interdisait de se prosterner devant qui que ce soit d’autre que Dieu.
Haman nourrit alors une haine profonde et décide de mettre en place un complot visant à se débarrasser de Mordekhaï mais également de l’ensemble de son peuple. Il réussit à obtenir l’accord du roi dans son entreprise criminelle.
Désespéré, Mordekhaï implore Esther de convaincre le roi de revenir sur sa décision. Celle-ci demande à son peuple de jeûner puis se rend auprès du roi en sa qualité de reine. Au cours d’un premier puis d’un second repas, Esther révèle au roi non seulement que sa vie fut sauvée par Mordekhaï du complot des eunuques mais également que le premier vizir Haman à l’intention de faire périr Mordekhaï, l’ensemble du peuple juif présent dans l’empire et à ce titre la reine elle-même.
Le roi décide alors de faire pendre Haman à la propre potence que ce dernier avait préparée pour Mordekhaï et inverse l’ordre d’extermination, qui s’applique alors à tous ceux qui s’en prennent aux Juifs.
Le lendemain fut un jour de célébration et de festin, où nourriture et argent furent distribués afin de commémorer la mise en échec de Haman et le sauvetage des Juifs de l’empire.
Si l’histoire de Pourim n’est corroborée par aucune des recherches historiques modernes sur l’empire perse et qu’elle est à ce titre sûrement un récit allégorique, elle porte en elle deux messages importants.
Le personnage d’Haman incarne le prototype de l’antisémite, celui qui pour faire payer l’offense qui lui a été faite par un Juif de refuser de s’agenouiller devant lui, décide l’extermination de la totalité de la population juive.
Symboliquement, la victoire d’Esther et de Mordekhaï sur Haman vient célébrer une victoire du peuple juif sur les descendants d’Amalec, leurs ennemis bibliques. Afin de pouvoir accéder à cette victoire, le récit nous compte la nécessité de faire preuve de courage, en se mettant en avant lorsque des circonstances plus importantes que notre propre sécurité sont en jeu. Ainsi Esther va révéler au roi son identité et son appartenance au peuple juif qu’elle dissimulait depuis tant d’années, afin de sauver son peuple de l’extermination.
Cette allégorie nous enseigne comment être fier de nos identités, même lorsque celles-ci semblent être opprimées, persécutées. Lorsqu’un moment fatidique arrive, il est de notre devoir de savoir nous affirmer tels que nous sommes, afin de donner l’exemple et de montrer aux opprimés que nous nous tenons à leur côté, que nous ne formons qu’une seule et même humanité face aux forces qui tentent d’effacer ces différences. Pourim nous rappelle l’absurdité et la dangerosité des discours excluants, racistes, xénophobes et antisémites et notre devoir de nous dresser face à ces discours, forts de nos spécificités culturelles et humaines.
Pourim est également une fable qui met en avant deux personnages féminins considérés comme exceptionnels pour l’époque : la reine Vashti et la reine Esther.
La première affirme un refus : celui de paraitre face au peuple et à l’armée, sur la demande du roi son époux, dans le but d’exposer à tous sa beauté. A travers ce refus d’être utilisée comme objet d’apparat et d’exhibition, un refus qu’elle payera de sa place de reine, Vashti affirme sa dignité de femme. D’ailleurs il est intéressant de noter comme cette action provoque un vent de panique chez les dignitaires du récit, qui réussissent à convaincre le roi de la destituer au motif selon eux que sa prise de position pourrait influencer les autres femmes de l’empire et les conduire à se dresser contre l’autorité de leurs maris. A bien des égards c’est cette position d’affirmation de la dignité féminine dans la première partie du récit qui ouvre la voie à l’entrée en scène du personnage d’Esther.
Celle-ci, à l’inverse de Vashti, incarne une force tranquille, discrète. Mais de courtisane pudique qui cache ses origines au roi, la reine Esther s’affirme au cours du récit comme une femme puissante, détentrice d’une force de caractère et d’un courage égalé par peu d’hommes. Choisie pour sa beauté, dans une foule d’autres jeunes femmes, elle apparait dans un premier temps comme un être dont le roi peut par essence disposer à volonté. Et pourtant, en affirmant son courage et en rejetant les interdits qui la frappent comme celui de pénétrer dans la chambre du roi sans y avoir été invitée, Esther déroge au rôle genré qui lui est attribué, prend son destin et celui de son peuple en main et mène celui-ci à la victoire.
Les textes tels qu’ils nous sont offerts sont souvent remplis de ces femmes (Eve, Rebecca, Deborah, les Filles de Tselophchad) qui illustrent souvent les vertus attendues des femmes dans les sociétés patriarcales qui étaient celles dans lesquelles ces récits étaient composés. Pourtant, elles réussissent également à imposer leurs personnalités et leurs choix, dans une recherche de justice, de (re)connaissance et de liberté, face à l’oppression et à la mainmise des hommes sur le pouvoir.
Il ne tient qu’à nous de garder ces multiples exemples à l’esprit pour nous souvenir que la justice et l’égalité entre les genres est un sujet aussi vieux que nos traditions et qu’il s’agit depuis toujours d’une lutte permanente de celles qui souhaitent légitimement obtenir le pouvoir sur leur vie et sur leur futur.
Nous fêtons Pourim jusque dans l’assiette: les Juifs perses, irakiens et indiens préparent des sambusaks, des pâtisseries fourrées aux dattes ; les Séfarades, des orejas de Aman, les oreilles d’Aman et des fazuelos, ces bandes de pâte enroulées sur elles-mêmes comme les oreilles du tyran, plongées dans la friture bouillante pour en sortir toutes croustillantes, puis saupoudrées de sucre glace et nappées de miel.
Les Hamantaschen, ces drôles de gâteaux ashkénazes en forme de tricornes farcis
de graines de pavot, datent de l’époque médiévale. Originaires d’Allemagne, on les appelait d’abord les Mohn-taschen, c’est-à-dire « les poches aux graines de pavot » (mohn = pavot). Les Juifs adoptèrent ce gâteau et les mohn-taschen devinrent les Hamon-taschen, selon la prononciation yiddish, « Les poches d’Aman ». Mohn, Hamon. Curieux jeu de mot et fortuit.
Quant à la symbolique du biscuit, certains disent que sa forme triangulaire rappelle le tricorne d’Aman. C’est peu probable. Ce type de chapeau n’existait pas en Perse. Ou alors, que les trois pointes représenteraient les trois patriarches, Abraham, Isaac et Jacob, et les graines de pavot, la fidélité d’Esther au judaïsme et son observance de la casherout avec une diète à base de graines.
Traditionnellement, les Hamantaschen étaient fourrés à la confiture de prunes, supplantée ensuite par les graines de pavot. On peut aussi les fourrer de chocolat, de confiture d’abricots, de pâte d’amandes, de halva, quand la fantaisie est au service de la gourmandise et de la tradition, c’est encore mieux ! Qu’on en prépare à volonté, à foison… comme la manne. D’ailleurs, une chanson séfarade le rappelle : « Pessah n’est qu’à une main de Pourim » !
Ingrédients
Pâte
Farce
Préparation
Pâte
Farce
Basé sur l’esprit du libre examen, de la tolérance à l’égard d’opinions contradictoires et du refus de tout dogme, plongeant ses racines dans les traditions humanistes et s’inspirant de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et du Droit des Peuples à disposer d’eux-mêmes, le programme de nos activités devrait contribuer à l’élaboration d’un judaïsme laïque, participer à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et le fascisme, renforcer notre solidarité avec Israël et avec toutes les communautés juives dans le monde qui mènent le combat pour assurer leur existence physique, morale et culturelle.
La lettre hebdomadaire et personnalisée du CCLJ.
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