Dries Van Langenhove, leader identitaire flamand et député du Vlaams Belang à la Chambre entre 2019 et 2023, a été condamné en mars dernier par le tribunal correctionnel de Gand pour infraction à la loi sur le racisme et le négationnisme (apologie du nazisme).
Pour de nombreuses associations antiracistes, il s’agit d’une victoire historique aux conséquences majeures pour le Vlaams Belang lors des prochaines élections. On peut en douter au regard des sondages favorables à ce parti d’extrême droite. Plus les jours passent, plus il conforte sa position de premier parti en Belgique. Même si nous ne partageons pas l’enthousiasme de ces militants antiracistes, nous ne boudons pas notre plaisir de voir un tribunal rappeler que l’antisémitisme et le négationnisme sont incompatibles avec les principes démocratiques.
Contrairement à ce que certains esprits tordus laissent souvent entendre, les Juifs de Belgique n’ont jamais baissé la garde face à l’extrême droite. Ils ne sont pas non plus tombés sous le charme d’un parti soudainement désireux d’apparaître comme le champion de la cause juive. Entre l’extrême droite et les Juifs de Belgique, il y aura toujours ce fossé de la Collaboration et cet abîme de 25.124 déportés qui les sépareront
à jamais. D’autant que les militants du Vlaams Belang revendiquent toujours l’héritage antisémite et collaborationniste du Mouvement flamand. Que ce soit par le biais de déclarations, de commémorations et de publications, tout atteste le maintien de marqueurs antisémites au sein de ce parti.
Les associations antiracistes et les partis démocratiques doivent néanmoins comprendre que si l’hostilité aux Juifs est consubstantielle à l’extrême droite, la passion antisémite est loin d’être inexistante à la gauche et à l’extrême gauche du spectre politique. Qu’elle prenne la forme de l’antisémitisme économique ou anticapitaliste, de l’obsession antisioniste faisant d’Israël l’incarnation du mal absolu, ou encore de la complaisance envers l’antisémitisme musulman, cette haine des Juifs est aussi virulente et nocive que celle exprimée par l’extrême droite. Combien de fois n’entendons-nous pas des militants de gauche insister sur la persistance ou la résurgence de l’antisémitisme d’extrême droite pour dénoncer simultanément ceux qui attirent leur attention sur les autres formes d’antisémitisme. Certains n’hésitent pas à agiter l’épouvantail de l’instrumentalisation de l’antisémitisme au profit du racisme antimusulman et du gouvernement israélien pour évacuer le problème. Parler de ces autres formes d’antisémitisme serait, comme ne cesse de le scander le leader français LFI Jean-Luc Mélenchon, un « rayon paralysant » destiné à délégitimer et diaboliser de braves militants solidaires des Palestiniens.
Aujourd’hui, les Juifs sont les cibles de discours de haine qu’aucun antiraciste sincère ne tolérerait s’ils visaient n’importe quelle autre minorité. Et pourtant, parmi ces militants antiracistes, ils sont nombreux à nous expliquer avec une condescendance insupportable ce qu’est l’antisémitisme et ce qu’il n’est pas. Les définitions qu’ils nous imposent ont un double objectif : immuniser leurs discours antisionistes dissimulant mal la haine des Juifs et banaliser leurs distorsions de la Shoah n’ayant rien à envier aux propos négationnistes de l’extrême droite.
C’est la raison pour laquelle refuser de condamner l’antisémitisme, d’où qu’il vienne, pour ne pas « faire le jeu » de l’extrême droite ou du gouvernement israélien, est un réflexe moralement et politiquement absurde. Ce n’est pas en dénonçant l’antisémitisme qu’on « fait le jeu » de l’extrême droite, mais c’est précisément en le taisant ou en l’ignorant volontairement.