Philippe van Meerbeeck “qui me dira la vérité ?”

Jean Noël
Dans le cadre du cycle de conférences organisé par Insistance et le CCLJ « Les croyances à l’exercice de la vérité », le neuropsychiatre et psychanalyste Philippe van Meerbeeck reviendra sur la place centrale du questionnement chez les adolescents. Lors de cette conférence qui se tiendra le mercredi 7 novembre à 20h au CCLJ, il débattra de cette question avec Jean Noël et Ann Alcantara.
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Docteur en médecine, neuropsychiatre et psychanalyste, Philippe van Meerbeeck fonde en 1979 le Département pour Adolescents et jeunes Adultes du Centre Chapelle-aux-Champs à Woluwe. Sa compétence dans ce domaine n’a cessé de s’affirmer depuis. En témoignent les nombreuses fonctions d’expert qu’il assure dans des associations centrées sur les enfants et les adolescents. On lui doit de nombreux ouvrages, comme L’infamille, la perversion du lien (Poche, 2003), A l’école de l’adolescence (De Boeck Edition), Dieu est-il inconscient ? (De Boek Supérieur, 2012), L’inentendu : Ce qui se joue dans la relation soignant-soigné (De Boeck Supérieur, 2009), etc.

Philippe van Meerbeeck me reçoit tout sourire dans son cabinet. Pour l’avoir déjà rencontré tant au Théâtre Poème que sur un plateau de télévision, j’ai retrouvé sa mine cordiale, sa gaieté naturelle et son débit de parole à la Françoise Sagan, où les mots se précipitent dans la bouche insuffisamment rapidement pour suivre le rythme effréné de sa pensée. Le centre nodal de son discours, depuis plus de quarante ans : la jeunesse, l’adolescence. Et c’est encore le cas ici, puisqu’il nous propose, pour faire suite à notre cycle de conférences « Les croyances à l’exercice de la vérité », la question insistante de l’adolescent à l’adresse de parents incrédules : « Qui me dira la vérité ? ».

Parce qu’un ado, au-delà de 13-14 ans, comme nous l’explique notre psychanalyste, ne croit plus aux histoires du Père Noël, et les légendes qui ont habité son enfance pour donner sens tant à sa présence au monde que le monde lui-même sont brutalement battues en brèche à partir du seul moment où il est capable de donner la vie. La puberté, la sexualité, consiste, comme étymologiquement son nom l’indique, à être séparé, à faire d’abord l’exercice de sa finitude, d’être un corps désirant, mais aussi désirable, un corps qui réclame de déchirer la gangue de tendresse maternelle initialement nécessaire à la croissance infantile pour se donner au monde…

Mais le monde, on en a perdu les repères de l’enfance et c’est pourquoi, nous explique Philippe, qu’entre 13 et 15 ans, on a besoin de croire en autre chose, comme pour reconstituer une structure que l’on a initialement perdue. Ce besoin de croire s’accompagne de rêves et d’un réenchantement, c’est la période des héros et héroïnes (qui se sont sensiblement éloignés des figures paternelles et maternelles), c’est une sexualité rêvée plus que vécue, c’est la croyance en de grandes causes, une hypersensibilité, mais aussi une foi unilatérale en certains principes qui sécurisent ou qui renforcent narcissiquement. Bref, dans cette première phase, l’adolescent bricole. C’est une période de tous les dangers. C’est ici, très précisément, que se trame la thématique de notre investigation : comment passe-t-on de la puberté à celle de l’adolescent qui s’est stabilisé en tant que jeune adulte ? Ou, pour le dire autrement, comment passe-t-on de la croyance infantile à l’épreuve d’une réalité qui reconstitue nos convictions en ayant intégré, dans sa foi, un doute méthodique propice à poursuivre la quête de vérité ? Face au vide, l’ado insiste : « Mais qui me dira la vérité ? ».

C’est là que Philippe insiste à son tour sur le leader positif, celui-là guide l’adolescent dans sa quête insistante, que ce soit un prof, un chef scout, un religieux ou un maître yogi. L’important, surtout, c’est que ce leader ne sera positif que s’il n’est pas complètement dupe du rôle qu’il doit occuper auprès du jeune, sous peine d’être un père de substitution qui le maintienne dans un état de suggestion. Le faux leader ne veut jouir que du pouvoir qu’il exerce sur l’adolescent en l’infantilisant : il use de la procédure que l’on utilise dans les mouvements sectaires, dans les milieux radicaux, comme ceux de l’islamisme politique ou encore comme on le voit dans le film de Kubrick, pour le formatage du G.I., Full metal jacket.

En réalité, quand on pense « les croyances à l’exercice de la vérité », on entre au cœur de l’adolescence. Impossible de faire l’économie de ce fait massif, et c’est pourquoi nous invitons le professeur Philippe van Meerbeeck, l’un des experts les plus reconnus de Belgique, pour nous parler d’une thématique aussi cruciale que vivante.

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