Alors que le Premier ministre Benjamin Netanyahou et son gouvernement s’attaquent chaque jour frontalement aux institutions, aux organisations et aux personnalités qui défendent l’État de droit et les valeurs démocratiques, il est essentiel de rappeler notre attachement à la Déclaration d’indépendance dévoilée à Tel-Aviv le 14 mai 1948 par David Ben Gourion. Non seulement elle donne naissance à Israël, mais elle contient les valeurs fondamentales qui doivent guider l’action de tout gouvernement à la tête de cet État juif et démocratique.
Plus de 77 ans après la lecture de la Déclaration d’indépendance d’Israël par David Ben Gourion, ses rédacteurs et signataires ont disparu depuis longtemps. Mais le document conserve toute sa nécessité. Dans la vie politique, le monde intellectuel, le droit israélien ainsi que dans les débats sur l’avenir d’Israël, la Déclaration d’indépendance demeure vivante parce qu’elle porte les valeurs fondamentales de l’État juif. Comme le soulignait un des plus célèbres présidents de la Cour suprême, Aharon Barak, « La Déclaration d’indépendance n’est pas une loi, mais c’est un texte fondateur. Elle guide l’esprit de notre droit, éclaire les lois fondamentales, et nous rappelle que la démocratie israélienne repose sur un équilibre entre tradition nationale et droits universels.
Vision du peuple et sa foi
Bien-sûr, elle n’est pas la constitution de l’État d’Israël. Cependant, déjà en décembre 1948, la Cour suprême israélienne a rendu un arrêt dans lequel elle précise que la Déclaration d’indépendance « exprime la vision du peuple et sa foi ». Cette formule confère toutefois à cette déclaration une valeur particulière : servir de boussole éthique à Israël. C’est d’ailleurs ce qui a conduit le législateur israélien à adopter en 1992 deux lois fondamentales garantissant les droits individuels. La première de ces lois fondamentales, portant sur la dignité et la liberté humaines, définit pour la première fois Israël comme « un État juif et démocratique » et toutes les deux stipulent que « Les droits fondamentaux de l’homme en Israël seront respectés dans l’esprit des principes énoncés dans la Déclaration d’indépendance de l’État d’Israël. »
La Déclaration d’indépendance, qui n’est plus seulement une source d’interprétation « exprimant la vision du peuple et sa foi », est devenue une source indépendante de droits de l’homme conférant aux citoyens israéliens une charte des droits à un niveau constitutionnel. Depuis cette « révolution constitutionnelle » des années 1990, la Cour suprême a reconnu une portée normative à la Déclaration d’indépendance, en particulier pour interpréter les différentes lois fondamentales adoptées par la Knesset, évaluer la compatibilité des lois ordinaires avec les principes démocratiques et les droits fondamentaux et garantir les droits implicites non explicitement inscrits dans la loi.
Tout comme il inimaginable qu’une personnalité politique américaine ose remettre en cause la Déclaration d’indépendance des États-Unis, il est impensable qu’un Premier ministre israélien et son gouvernement puissent impunément s’attaquer à la lettre et l’esprit de la Déclaration d’indépendance de 1948. Plus qu’une faute politique majeur, c’est une trahison de l’héritage sioniste légué par les Pères fondateurs d’Israël.
« (…) Le 29 novembre 1947, l’Assemblée générale des Nations unies a adopté une résolution demandant la création d’un État juif en Palestine et invité les habitants de la Palestine à prendre les mesures nécessaires pour l’exécution de cette résolution. Cette reconnaissance, par les Nations unies, du droit du Peuple juif à créer son État est irrévocable.
C’est là le droit naturel du peuple juif d’être, comme toutes les autres nations, maître de son destin sur le sol de son propre État souverain.
EN conséquence, nous, membres du Conseil national représentant la communauté juive de Palestine et le mouvement sioniste, nous nous sommes rassemblés ici, en ce jour où prend fin le mandat britannique, et en vertu du droit naturel et historique du Peuple juif et conformément à la résolution de l’Assemblée générale des Nations unies, nous proclamons la création d’un État juif en terre d’Israël qui portera le nom d’ÉTAT D’ISRAËL.
NOUS DÉCLARONS que dès l’expiration du mandat, en cette veille de Chabbat, 6 Iyar 5708 (15 mai 1948), et jusqu’à l’installation des autorités régulières de l’État, dûment élues, conformément à la Constitution qui sera adoptée par l’Assemblée constituante convoquée avant le 1er octobre 1948, le Conseil remplira les fonctions de Conseil provisoire de l’État et son organisme exécutif, le Directoire du Peuple, fera fonction de gouvernement provisoire de l’État juif qui sera appelé « Israël ».
L’ÉTAT D’ISRAËL sera ouvert à l’immigration juive et aux Juifs venant de tous les pays de leur Dispersion ; il veillera au développement du pays pour le bénéfice de tous ses habitants ; il sera fondé sur la liberté, la justice et la paix selon l’idéal des prophètes d’Israël ; il assurera la plus complète égalité sociale et politique à tous ses habitants sans distinction de religion, de race ou de sexe ; il garantira la liberté de culte, de conscience, de langue, d’éducation et de culture ; il assurera la protection des lieux saints de toutes les religions et sera fidèle aux principes de la Charte des Nations unies.
L’ÉTAT D’ISRAËL sera prêt à collaborer avec les agences spécialisées et les représentants des Nations unies pour l’application de la résolution de l’Assemblée générale en date du 29 novembre 1947 et prendra toutes les mesures nécessaires pour réaliser l’union économique de l’ensemble de la Palestine.
NOUS DEMANDONS aux Nations unies d’aider le Peuple juif à édifier son État et de recevoir l’État d’Israël dans la famille des Nations. NOUS DEMANDONS– face à l’agression dont nous sommes l’objet depuis quelques mois – aux habitants arabes de l’État d’Israël de préserver la paix et de prendre leur part dans l’édification de l’État sur la base d’une égalité complète de droits et devoirs et d’une juste représentation dans tous les organismes provisoires et permanents de l’État.
NOUS TENDONS la main à tous pays voisins et à leurs peuples et nous leur offrons la paix et des relations de bon voisinage ; nous les invitons à coopérer avec le Peuple juif rétabli dans sa souveraineté nationale. L’État d’Israël est prêt à contribuer à l’effort commun de développement du Moyen-Orient tout entier.
NOUS DEMANDONS au Peuple juif dans sa Dispersion de se rassembler autour des Juifs d’Israël, de les assister dans la tâche d’immigration et de reconstruction et d’être à leurs côtés dans la grande lutte pour la réalisation du rêve des générations passées : la rédemption d’Israël. Animés par la foi dans le rocher d’Israël, nous signons cette Déclaration en cette séance du Conseil provisoire de l’État, sur le sol de la Patrie dans la ville de Tel-Aviv, cette veille de Chabbat, 5 Iyar 5708, 14 mai 1948. »







