Quand la haine du Tutsi se décline au présent à l’Est du Congo

Bernard Maingain
Le Collectif de défense des Tutsi de nationalité congolaise au Nord et au Sud Kivu a pu organiser une conférence de presse dans les locaux du CCLJ le 19 décembre dernier avec l’appui du Collectif belge pour la prévention des crimes de génocide et contre les négationnismes. Que ces deux organisations en soient ici chaleureusement remerciées..
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Le Collectif de défense des Tutsi de nationalité congolaise au Nord et au Sud Kivu a pu organiser une conférence de presse dans les locaux du CCLJ le 19 décembre dernier avec l’appui du Collectif belge pour la prévention des crimes de génocide et contre les négationnismes. Que ces deux organisations en soient ici chaleureusement remerciées.

Le signataire du présent papier est alerté depuis plusieurs années par les habitants de la région, en raison de la recrudescence des discours de haine et des pogroms anti-tutsi à l’est du Congo. Nous avions repéré la virulence de ces discours dans un contexte d’extermination de la communauté Banyamulenge sur les Hauts Plateaux au Sud Kivu. Ces discours fleurissaient en République démocratique du Congo avec une intensité similaire à celle que nous avions observé avant le génocide de 1994 et cette situation nous avait alerté. Comme un message prémonitoire… Par ailleurs quelle ne fut pas notre surprise de constater que certaines radios présentes sur les réseaux sociaux avaient un site d’hébergement en Belgique et que des fonds étaient sollicités auprès de la diaspora congolaise en Belgique et ce ouvertement pour financer un groupe Maï-Maï qui se targue d’éradiquer le Sud Kivu de la présence de la communauté Banyamulenge alors que sa présence est multiséculaire. Plainte avait été déposée à Bruxelles dès décembre 2021 avec dépôt des preuves et notamment des éléments de rattachement à la Belgique. Simultanément, notre équipe d’avocats déposait une longue plainte particulièrement étayée entre les mains du Procureur général et de l’Auditeur Militaire à Kinshasa. Plainte non encore instruite du propre aveu du Procureur général de Bukavu qui affirme ne pas disposer de moyens pour mener ces enquêtes. Quelle tristesse pour ne pas dire plus.

En juin de cette année, ce sont les communautés du Nord Kivu et spécialement les Tutsi du Masisi qui nous appelaient à l’aide. Notre équipe a monté un groupe d’enquête qui s’est rendu à Goma et aussi sur les magnifiques collines du Masisi et nous y avons découvert tous les signaux indicateurs d’assassinats et pogroms menés par des milices Nyatura ou FDLR – le groupe né des mouvements génocidaires au Rwanda- sous l’œil indifférent voire bienveillant de certains membres des FARDC, l’armée régulière congolaise. Le groupe a alerté le secrétaire général des Nations Unies et son envoyée spéciale pour la prévention des génocides s’est rendue à Kinshasa et, à son tour, elle a lancé un cri d’alarme. Dans le même temps, nous créions un réseau d’alerte qui nous a permis de recueillir des dizaines de témoignages et de preuves de ces massacres qui ont aussi touché la communauté Héma en Ituri dans la région de Bunia, sous les coups de butoirs particulièrement cruels d’une milice locale dénommée la Codeco. Le seul crime de toutes ces populations c’est qu’elles sont qualifiées de Tutsi.

De nombreuses plaintes sont prêtes et dans quelques jours elles seront déposées à Kinshasa, Goma et Bukavu. Nous relancerons ensuite la procédure en Belgique et préparons de nouvelles plaintes contre les auteurs de discours de haine qui émettent depuis l’Europe et l’Amérique du Nord. Un combat de titan avec des moyens très limités.

Ce qui nous a le plus choqué c’est le comportement de la Lucha (Lutte pour le changement). Cette association qui se présente comme activiste des droits de l’homme auprès des autorités européennes, tient des discours d’une virulence inadmissible dans les Kivu. Les soutiens de la Lucha se retrouvent dans Fight against Impunity, cette ONG empêtrée dans le scandale du Quatargate au Parlement européen. Cette même ONG, dont la présidence d’Honneur est assurée par le docteur Mukwege, lui aussi soutien de la Lucha. Marie Arena a aussi soutenu ce mouvement de la haine au Parlement et au sein de Fight against Impunity. Deux ONG congolaises indignées ont saisi la Présidente du Parlement européen et demandé un audit des mouvements financiers vers la Lucha. Aujourd’hui les signataires de la lettre sont menacés de mort. Nous avons demandé à la Monusco (Mission de l’ONU) d’assurer leur protection. Notre collectif ne lâchera pas et nous allons déposer des plaintes contre ces personnes de la Lucha porteuses de discours de haine qui se donnent une image falsifiée de protecteurs des droits de l’homme à Bruxelles.

Ce combat vise le retour à l’Etat de Droit, la fin de la corruption et le respect de chaque être humain dans sa singularité, la diversité étant la richesse de la République démocratique du Congo. C’est à ce prix que la paix reviendra dans ce magnifique pays dont les frontières fabriquées de toutes pièces par le pouvoir colonial au mépris de l’histoire des peuples de la Région, doivent être respectées conformément aux normes de droit international public.

Pour ceux que cela intéresse suivre notre interview sur Afrikarabia : http://afrikarabia.com/wordpress/me-bernard-maingain-et-dans -la-région-des-grands-lacs-les-bonnes-volontes-finiront-par-lemporter/

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