Regards n°1060

Une jeune éthopienne représente Israël à l’eurovision

C’est une grande première pour Israël. L’Etat hébreu sera représenté au prochain concours Eurovision de la chanson le 16 mai 2020 à Rotterdam par une Israélienne d’origine éthiopienne. Agée de 19 ans, Eden Alene, qui effectue actuellement son service militaire, a en effet remporté l’épreuve de sélection dans son pays, plébiscitée par le jury et le public pour sa reprise de la chanson « Halo » de Beyoncé, dans le cadre de l’émission « A star is born ». « Aujourd’hui, je suis la première représentante éthiopienne d’Israël à l’Eurovision et j’en suis très fière », a-t-elle déclaré. « Pensez à notre vie lors du début de l’alya des Ethiopiens et regardez où nous en sommes maintenant. C’est un autre monde ».

Celle qui est née et a grandi à Jérusalem a déménagé cette année avec sa mère Zahava dans la ville de Kiryat Gat (au Sud du pays). Ses parents ont divorcé quand elle avait 4 ans, et elle n’a eu aucun contact avec son père depuis. Elle a étudié la danse classique pendant dix ans avant de quitter une école religieuse pour rejoindre un établissement laïque afin de suivre des cours de théâtre et de chant.

 

Une trajectoire exemplaire qui n’est pas sans rappeler le parcours modèle de Yityish « Titi » Aynaw, la première femme africaine d’origine éthiopienne à avoir été élue Miss Israël 2013. Alors âgée de 21 ans, la première « reine noire » avait marqué les esprits. Originaire de Gondar, cette orpheline arrivée dans l’Etat hébreu à l’âge de 12 ans avait été envoyée chez ses grands-parents à Netanya et placée dans un pensionnat religieux, avant de faire son service militaire achevé… avec le grade de lieutenant.

Un mois après son sacre, elle fut invitée à la table de Barack Obama, lors du dîner de gala organisé à l’occasion de la première visite officielle du chef d’Etat américain dans l’Etat hébreu. A l’époque, Yityish Aynaw, qui se voyait faire carrière dans le mannequinat, avait espéré que son élection contribue à « changer le regard des Israéliens sur sa communauté ».

Un symbole fort

Parmi les autres personnalités d’ascendance éthiopienne à avoir conquis le public israélien figure aussi la chanteuse Ester Rada. Cette artiste influencée par les grandes voix de la Soul, telles Nina Simone, Ella Fitzgerald, ou encore Aretha Franklin, chante principalement en anglais.

Au nombre de 150.000, dont 50.000 nés dans l’Etat hébreu, les Juifs Ethiopiens, désignés comme « Falashas », même s’ils préfèrent l’appellation de « Beta Israël », ont bénéficié de la « Loi du Retour » lors de leur arrivée en Israël à la faveur de deux grandes vagues d’immigration organisées en 1984, en pleine guerre civile, et en 1991. Mais leur intégration socio-économique s’est souvent avérée difficile. Aujourd’hui encore, un tiers des familles éthiopiennes israéliennes, logées pour la plupart dans des villes de la périphérie, vit sous le seuil de pauvreté.

En outre, cette communauté reste victime de racisme et de discrimination, pour l’accès au logement et à l’éducation. Sans compter les bavures policières qui, ces dernières années, ont poussé les Ethiopiens d’Israël à manifester -parfois de manière violente- dans plusieurs grandes villes du pays pour dénoncer les phénomènes d’exclusion à leur égard.

Autant dire que dans ce contexte, la qualification d’Eden Alene pour l’Eurovision 2020 est hautement symbolique. Le Premier ministre Benjamin Netanyahou s’est d’ailleurs empressé de féliciter la candidate sur Twitter, en écrivant : « Eden, tu es une championne ! Nous te faisons confiance pour rapporter l’Eurovision à la maison. Bonne chance ! »

Eden Alene s’était déjà fait connaître du public israélien après avoir remporté le programme télévisé « X-Factor » en 2018. Une victoire qu’elle avait dédiée à sa mère. Israël a gagné quatre fois l’Eurovision et compte bien rééditer l’exploit avec cette jeune femme d’ascendance africaine. La chanson qu’Eden Alene interprètera n’est pas encore choisie. Elle pourrait être chantée non pas en hébreu, mais en amharique, ex-langue officielle de l’Ethiopie. De quoi rendre encore plus atypique sa prestation…

Écrit par : Nathalie Hamou

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Annette Wieviorka
L'itinéraire d'Annette Wieviorka
Historienne spécialiste de la Shoah, directrice de recherche honoraire au CNRS et vice-présidente du Conseil supérieur des archives depuis 2019,
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