La narratrice, écrivaine (Nathalie elle-même ?) reçoit une invitation à animer un atelier d’écriture à raison de deux heures par semaine. Elle n’a jamais fait cela auparavant, ne s’en sent pas capable, et surtout, cela se passerait au sein d’un établissement psychiatrique, au fin fond de Bruxelles, appelé les Saules. Elle a côtoyé un peu la psychiatrie, a elle-même subi une analyse, peu concluante. Cependant, après avoir terminé un manuscrit, la voici désœuvrée et envahie par le doute, alors elle franchit le pas. Son parcours ? Des études de lettres et quelques années dans la boutique de prêt-à-porter de ses parents. Et, ce qui ne gâche rien, une certaine pratique de l’écriture. La voici prête. Mais comment s’y prendre, avec ces êtres inconnus et réputés « différents », « perchés » ou dépressifs ? Celle qui se scarifie, celui qui veut tout le temps dormir, celui qui entend des voix ? Assez vite, la maîtresse de jeu perd le contrôle. Les failles des écrivains autour de la table troublent toujours davantage la narratrice, la poussant à reconnaître les siennes. « J’ai beau être du bon côté, le rideau de perles entre eux et moi ne se tire pas si facilement. » Et si cet atelier d’écriture, dont la visée est peut-être de permettre à ces individus de se découvrir eux-mêmes, révélait autant de traits cachés chez celle censée mener la danse ?
En lisant le beau récit de Nathalie Skowronek, empreint d’une authentique humanité, nous comprenons cette vérité évidente : c’est quand nous avons le courage de nous confronter à l’altérité que pourrions découvrir quelque chose sur nous-mêmes. Et si ces incitations à écrire, aux Saules, faisaient place à un geste peut-être encore plus essentiel : se parler ? On l’aura compris : le dialogue que l’autrice engage de façon si empathique avec les autres, en particulier ceux qui ont tant besoin de reconnaissance, est avant tout un dialogue avec elle-même, plus encore qu’elle ne le pense.