Colette Fellous, Le petit foulard de Marguerite D

Henri Raczymow
Je lis, tu lis, ils écrivent: Colette Fellous, Le petit foulard de Marguerite D., Gallimard, 109 p.
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Elles se parlent comme deux vieilles copines, alors même que Marguerite a l’âge de sa mère. Elles parlent de ce roman Emily L., que Colette aime beaucoup. Cela se passe chez Marguerite à Paris rue Saint-Benoît numéro 5, troisième gauche. Ou bien dans la maison de campagne, à Neauphles-le-Château. Elles parlent chiffons. Les robes que portent les personnages de Marguerite, robe rouge, robe grenat, robe sans manches, robe de soie blanche. Et la mer. Les falaises du Havre, Trouville et le hall des Roches Noires et la plage où s’époumone à jamais Hervé Villard, Capri c’est fini et dire que c’était la ville…, et puis le Mékong, le Pacifique, le Siam, les rizières, le marché de Sadec, quelque part en Cochinchine, sur le delta, où Duras n’est jamais retournée, tout se mélange.

Et puis ces noms un peu mythiques : l’Argentin Carlos d’Alessio, le compositeur de la musique si envoûtante d’India Song, et Bulle Ogier (« De Bulle, Marguerite disait que c’était une vague »), et Madeleine Renaud et Michael Lonsdale…Et l’amant Yann Andrea, et le fils, Jean Mascolo, qui passe dans l’appartement de la rue Saint-Benoit, discret comme un chat. Cet amour-là, surtout, avec les virées des amants, depuis l’été 80, quand il avait 27 ans et elle 66. Leurs virées alcoolisées vers Quillebeuf et son bar de la Marine… On ne comprend pas tout ? La belle affaire. « Quand c’est écrit, ça devient vrai ». C’est pourquoi justement il faut écrire. Et puis : « Elle non plus ne cherchait pas à tout comprendre ».

D’aucuns diront que Colette Fellous aurait une tendance à faire du Duras, avec autant d’ombres que de lumières. Il faut l’admettre. C’est qu’elle l’aime tant. Quelque chose les relie toutes les deux, on ne sait quoi, malgré les décennies qui les séparent. « Une enfance à l’étranger ? L’expérience des pays colonisés ? Des mères un peu bizarres, un frère trop aimé ? Une langue maternelle qui ne coïncidait pas avec les paysages dans lesquels on avait grandi ? Le sentiment obsédant de la séparation ? De l’absence ? ».

Le mimétisme est le signe même de l’amour. Colette cite Marguerite, longuement, énamourée. La mer, les fleuves, les rives, les eaux, les plages. Capri, c’est fini, encore et encore.

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