Marlène Schiappa : “entre toutes les femmes”

Laurent-David Samama
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Elle est l’égérie de la Macronie. Son héroïne et sa combattante la plus acharnée. Marlène Schiappa, ministre déléguée à la citoyenneté, apporte à l’aréopage présidentiel ce qu’il faut d’incarnation dans le monde froid, feutré et (forcément) technocratique des ministères.

Son engagement est d’abord celui du terrain. En 2008, celle qui était encore loin de s’imaginer un avenir en politique lance le réseau « Maman Travaille » traitant de la conciliation entre vie professionnelle et vie privée. Schiappa est alors une jeune mère active qui raconte la vie de ses semblables. Son succès est immédiat. Au fil des années, « Maman Travaille » se transforme en un vvéritable lobby et Marlène Schiappa se fait un nom. Au point d’être repérée par Jean-Claude Boulard, ancien maire socialiste de la ville du Mans, son fief, au tournant des années 2000. On connait la suite : la militante féministe est d’abord élu conseillère municipale puis bientôt adjointe au maire chargée de l’égalité, de la lutte contre les discriminations et de la charte LGBT dans sa ville. On la retrouve ensuite dans l’ombre du gouvernement, en qualité de conseillère ministérielle, auprès de la ministre de la famille et des Droits des Femmes, Laurence Rossignol. Le tout jusqu’à l’irruption sur le devant de la scène politique d’Emmanuel Macron et sa volonté toute élyséenne de faire voler en éclat le clivage gauche-droite.

Grand récit féministe

Voilà donc Marlène Schiappa propulsée sur le devant de la scène. De débats en interviews, la secrétaire d’état devient une personnalité de premier plan et profite de l’appel d’air #MeToo conjugué à l’essor de la nouvelle vague féministe (d’Alice Coffin à Delphine Horvilleur jusqu’aux Femen) pour se faire entendre. Il y a des coups à prendre mais qu’importe : la ferveur qui l’anime est « généreuse ». Cette dernière combattant, de son propre aveu, « pour une égalité joyeuse ». Désormais ministre déléguée à la Citoyenneté, Marlène Schiappa a fort à faire sur les terrains de la laïcité, de la lutte contre les séparatismes, de la délinquance. Ses engagements, eux, sont restés les mêmes. Dans son dernier livre, elle a ainsi souhaité rendre hommage à ces héroïnes du quotidien rencontrées au hasard de ses précédentes fonctions. Voilà comment nait Entre Toutes les Femmes. Un livre rassemblant onze portraits de femmes animées d’une « irrépressible envie de vivre en dehors des carcans ». Des femmes qui conduisent des camions dans la région de Toulouse, créent des écoles pour filles en Algérie, cuisinent des légumes dans les rues en terre du Burkina Faso, font voter des lois contre le viol aux Etats-Unis, dessinent des chapeaux à Dijon, se sont échappées des maisons où Daesh retient ses esclaves sexuelles, révolutionnent la publicité dans le monde entier, ou nettoient des chambres d’hôtel à Marseille.

Juifs et femmes, même combat ?

En se gardant bien de fabriquer des roles models inaccessibles, l’auteure a le mérite de distinguer des parcours de vies, des trajectoires méritoires. Le souffle concret de la sororité anime le récit de ces vies souvent banales, parfois extraordinaires. Loin du pamphlet, le document de Marlène Schiappa constitue une juxtaposition de réel qui donne à réfléchir. Si bien qu’au fil des pages, des intuitions jaillissent. Comme, par exemple, la nécessité de faire œuvre commune lorsqu’on combat le racisme, l’antisémitisme et que l’on poursuit de ses vœux l’avènement d’une société où règne l’égalité femmes-hommes. On le sait : la récurrence des attaques misogynes se conjugue régulièrement avec la survenue d’actes antisémites. Comme si tout cela faisait système. On retrace alors le fil. De tout temps, femmes et Juifs furent accusés des mêmes maux, de la même volonté de pervertir la société. Au Moyen-Age, la malice des uns s’est substituée à l’œuvre prétendument malfaisante des autres. Et l’on mesure alors, dans un élan de progrès, dans une recherche de lumière, la nécessité de bâtir une véritable convergence des luttes.

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